mardi 11 septembre 2007

La trilogie républicaine (I) V.1



Liberté, Egalité, Fraternité.


Sous ce triptyque à l'allure généreuse se cache en fait les pires poisons qui conduisent à la destruction de notre culture et de notre civilisation. C'est pourquoi il est intéressant d'analyser chacun de ces termes pour en connaître leur duplicité. Le drame lorsque nous parlons de liberté, pour ne citer que le premier terme, tient à ce que chacun lui donne une signification qui lui est personnelle. Or la liberté d'un républicain, laïciste n'a rien à voir avec celle que l'Eglise nous enseigne et nous propose.


Aujourd'hui nous limiterons notre étude au premier terme, en nous réservant une étude sur chacun des deux autres pour les jours prochains.

La liberté se présente sous deux visages.

Voyons d'abord celui que nous propose la déclaration des droits de l'homme et du citoyen :

Article 4 - La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi.


On observera de prime abord que la définition est négative: faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Il est courant de voir que bon nombre de définitions sont construites sur une négation. Or la négation est avant tout négation de toute réalité en même temps qu'elle ne définit pas cette même réalité. Elle peut aboutir à des paradoxes absurdes. J'en citerai deux, produits de l''esprit révolutionnaire:

- Pas de liberté pour les ennemis de la liberté (révolution française)

- Il est interdit d'interdire (mai 1968)


Le premier slogan joue sur les mots car les ennemis de la liberté s'opposaient à la liberté révolutionnaire qui n'avait rien à voir avec la véritable liberté. Nous sommes en face de deux concepts de la liberté diamétralement opposés. Celle des révolutionnaires qui expulsaient les religieux et religieuses de leur monastère en leur signifiant qu'ils étaient désormais libres. Or, la liberté des religieux était précisément de s'enfermer à l'intérieur de la clôture monastique pour se consacrer totalement à Dieu.


Le slogan de mai 1968 atteint le comble du paradoxe en posant comme principe fondamental de la vie en société ce que ce même slogan interdit. Certains y ont vu un trait d'esprit. Il n'en n'est rien! Ce slogan constituait une revendication fondamentale des néo-révolutionnaires bourgeois, revendication qui d'ailleurs est aujourd'hui largement appliquée. Il est la marque essentielle au sens de l'être (esse = être) de l'esprit révolutionnaire qui n'est pas à une contradiction près. L'esprit révolutionnaire pose des grands principes afin d'émanciper les peuples supposés asservis. Or, jamais les peuples n'ont été autant oppressés que sous les régimes révolutionnaires qui prétendent agir pour leur bien. Les exemples foisonnent: la Russie de Lénine et Staline, les pays du bloc de l'est sous "liberté" surveillée derrière le rideau de fer, la Chine maoïste, Cuba et son "lider massimo", le Vietnam d'Ho Chi Min, les Khmers rouges, l'actuelle Corée du nord et bon nombre d'états africains. Nous sommes en droit de nous poser la question de la nature de l'esprit révolutionnaire qui répand le sang dès que ses zélés serviteurs s'emparent du pouvoir.




Lénine, révolutionnaire qui mit en pratique la pensée marxiste de 1917 à 1924, date de sa mort. "Notre moralité est entièrement subordonnée aux intérêts de la lutte des classes", disait-il.



La réponse est contenue dans l'encyclique Divini Redemptoris du 19 mars 1937:

" Vénérables Frères, voilà le nouvel Evangile que le communisme bolchevique et athée prétend annoncer au monde, comme un message de salut et de rédemption ! Système rempli d'erreurs et de sophismes, opposé à la raison comme à la révélation divine: doctrine subversive de l'ordre social puisqu'elle en détruit les fondements mêmes, système qui méconnaît la véritable origine, la nature et la fin de l'Etat, ainsi que les droits de la personne humaine, sa dignité et sa liberté."


Le système nazi ne faisait pas mieux dans le registre du cynisme. Arbeit macht Frei - le travail rend libre - telle était la devise que les déportés pouvaient lire à l'entrée des camps de concentration. En France en particulier, il est de bon ton de pousser des cris d'orfraie quand on évoque la période nazie mais dans le même temps on affiche une certaine complaisance vis à vis du communisme. Perversion de la pensée, car les deux systèmes ne s'opposent qu'en apparence. Ils sont en fait très voisins en se fondant sur le culte de l'homme sans Dieu. Ils se nourrissent d'idéologies contraires à la loi naturelle.



Il est, soit dit en passant, consternant d'observer que dans l'épiscopat français certains évêques affichent une certaine sympathie à l'égard des communistes. Cela montre leur totale ignorance sur la réalité du communisme, du moins faut-il l'espérer.



Inscrite sur le fronton de l'entrée du camp d'Auschwitz la devise "Arbeit macht frei". Il est curieux de noter que le travail devient dans les deux systèmes totalitaristes, nazisme et marxisme, un moyen privilégié pour la mise en application de l'idéologie. Nous ferons une étude approfondie sur ce point dans un article ultérieur consacré au communisme.


Le propre des idéologies marxiste et nazie est de rejeter la vérité objective. Sans entrer dans un cours de philosophie et pour simplifier disons qu'il existe une vérité naturelle. C'est elle qui nous permet de déterminer ce qui est bon ou mauvais. Je n'ai pas besoin de me lancer dans de grandes théories pour savoir que voler le bien d'autrui est un acte mauvais. Ainsi, la pensée est soumise à la vérité qui ne dépend pas de l'homme, autrement dit la pensée est soumise à l'objet. Les philosophies idéalistes renversent cet ordonnancement. C'est la pensée de l'homme qui fixe les lois sans tenir compte de la réalité objective. C'est ce qu'on appelle l'idéalisme.




Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770 - 1831). Sa philosophie pose l'idée comme un absolu coupé de toute réalité. Il est à la source des deux totalitarismes, le nazisme et le marxisme qui reprendra à son compte l'idéalisme pur en le plaquant sur le matérialisme dialectique. Nous expliquerons ce paradoxe qui n'est qu'apparent mais qui révèle la nature intrinséquement perverse de l'idéalisme pour reprendre l'expression du pape Pie XI.

Or la pensée de gauche en France se nourrit de la pensée révolutionnaire. Il suffit de voir le nombre de candidats se réclamant de l'extrême gauche qui se sont présentés au premier tour des dernières élections présidentielles.


C'est à partir de ce même idéalisme que le président Jacques Chirac a pu dire que la loi civile n'avait pas à être subordonnée à la loi morale. Ce propos ahurissant est le fruit même de ce refus du réel comme objet auquel la pensée doit être soumise. C'est le péché d'orgueil, c'est le péché originel de l'homme qui se fait Dieu sans Dieu.



La liberté républicaine n'est ni plus ni moins que cette volonté à s'affranchir de la vérité qui aboutit à la permissivité puisque seul l'homme fixe les normes.

La liberté en Dieu est tout autre.


Cette liberté s'oppose au déterminisme ou au fatalisme. Autrement dit, nous sommes libres de nos actes. Dieu nous crée en nous laissant notre liberté, notamment celle de choisir entre le bien et le mal. Notons en passant que la définition de la liberté dans la DDH de 1789 ne parle pas du bien. Elle ne fait référence qu'aux bornes fixées par la loi. Or sans cesse nous reculons ces bornes ce qui ouvre largement le champ aux idées les plus pernicieuses.


Ainsi nous nous créons des droits nouveaux. Le droit à l'avortement est un exemple flagrant car il montre à quel point la pensée moderne est viciée. Les féministes ont revendiqué le droit à l'avortement en s'appuyant sur ce principe sorti d'on ne sait où qui veut que la femme dispose de son propre corps. Cette affirmation est un pur produit de l'idéalisme qui s'affranchit du réel objectif.
La liberté présuppose la vérité. Le pape Jean Paul II dans l'encyclique Veritatis splendor de 1993 montre que la crise que connaît aujourd'hui le monde au sujet de la vérité tient à la perte de l'idée d'une vérité universelle quant au Bien connaissable par la raison humaine. On aboutit nécessairement à une vérité subjective fondée sur le caractère de sincérité avec soi-même. Oui, mais on peut être sincère avec soi-même et se tromper gravement. Nous ne pouvons trouver la vérité extérieure à nous qu'en nous soumettant au réel objectif. Le pape précise que "l'autonomie de la raison ne peut pas signifier la création des valeurs et des normes morales par la raison elle-même."

La liberté est donc nécessairement indissociable de la vérité.

Ego sum via et veritas et vita dit Jésus-Christ à Thomas (Jean XIV, 6). Le Christ lie les trois mots le chemin, la vérité et la vie comme indissociables pour parvenir à la vraie vie qui n'a que faire de théories fumeuses et mortifères. Nul ne peut avoir la vie sans suivre le chemin de Jésus qui est un chemin de vérité.

Plus encore la vérité enseignée par le Christ est source de liberté. Toujours selon saint Jean, c'est encore le Christ qui dit aux Juifs qui croyaient en lui : "Si vous demeurez dans l'observation de ma parole vous serez véritablement mes disciples et vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres."

Or le slogan des pro-avortements s'affranchit gravement de la vérité sur deux points:


1 - Tout d'abord ce principe est absurde en soi. Nous ne sommes, pas plus les hommes que les femmes, maîtres de notre corps. Nous n'en sommes que les usufruitiers, chargés d'en avoir bon usage. La maladie peut en disposer à nos dépens, la mort nous l'enlève.


2 - Plus grave encore, ce principe se fonde sur un mensonge car en l'occurrence le droit à l'avortement ne consiste pas pour la femme à disposer de son corps mais à disposer de celui d'un être distinct de son corps mais dont elle a reçu la garde momentanément avec pour mission insigne de le conduire à la vie extra-utérine.


Par contre, ce qui est bien réalité c'est la suppression de la vie in utero, suppression d'une vie humaine masquée artificiellement par la qualification technocratique d'IVG.

A cette liberté de transformer, par orgueil, par égoïsme le monde qui nous a été donné pour le façonner à la mesure de nos idées les plus folles, je préfère, pour ma part, rechercher la difficile perfection en Dieu, avec sa grâce et dans la liberté qu'il nous a donnée et qui nous confère notre dignité en Lui.


J'ajouterai pour conclure que l'on doit se garder de tout amalgame. Notre république est détestable parce qu'elle se fonde sur une idéologie erronée. Ceci étant la république peut être une forme de gouvernement si elle se conforme aux valeurs naturelles. La république est un système politique neutre comme la monarchie qui ne vaut que par ce que valent les hommes. Le rejet de la trilogie n'est donc pas nécessairement le rejet de la république, mais de la république laïque telle que les esprits modernes l'ont créée.

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