La lecture de ce titre pourrait laisser accroire que nous sommes dans un joyeux vaudeville ou une nouvelle d'Alphonse Daudet. Et bien non! Nous sommes en face d'une situation consternante même si elle n'est pas la première dans son genre et sûrement pas la dernière. Dans je ne sais plus quelle petite bourgade du sud-ouest de la France, là où l'accent des habitants a gardé son caractère rocailleux et savoureux des vieilles terres de France où il fait bon vivre, des paroissiens ont décidé il y a quelques semaines de faire grève de messes et menaçaient même de boycotter la cérémonie de confirmation prévue.
Pourquoi tout ce remue-ménage? Tout simplement parce que les bons paroissiens avaient décidé de soutenir leur curé. Très bien, me direz-vous, voilà des fidèles catholiques en pleine union avec leur pasteur et donc avec l'Eglise. Oui, mais là où le bât blesse, c'est que le curé venait d'être relevé de ses fonctions par l'évêque diocésain pour liaison notoire depuis une vingtaine d'années avec une femme du cru.
D'où la bronca des paroissiens venus le dimanche suivant mais refusant d'assister à la messe célébrée par un nouveau prêtre. La télévision s'est bien sûr empressée de se rendre sur les lieux, trop contente de pointer du doigt cette Eglise catholique, obscurantiste, passéiste et qui ne veut rien entendre quant au mariage des prêtres. Et de nous montrer des fidèles éplorés venus soutenir leur curé sanctionné. C'est que nous l'aimons bien notre curé, d'ailleurs c'est un excellent prêtre, il n'y a pas de raison qu'on nous l'enlève, entendait-on dire sur le parvis de l'église tandis que le nouveau prêtre célébrait la messe en présence de quelques paroissiens qui avaient su raison garder dans cette affaire.
Cette triste affaire mérite quelques observations.
Il ne m'appartient pas de juger le curé. Cependant, il convient de se rappeler qu'il a été ordonné prêtre pour l'éternité. Tu es Sacerdos in aeternum. Pour avoir oublié, victime de la fragilité humaine, son engagement devant Dieu, il était juste que le curé fût sanctionné pour la situation désordonnée dans laquelle il s'était fourvoyé.
L'affaire aurait dû en rester là, péripétie tristement banale et douloureuse. Mais ce qui me paraît le plus grave, c'est avant tout le comportement des paroissiens dont le discernement semble complétement anesthésié. Ceux-ci nous disent qu'ils ne veulent pas perdre leur curé au motif qu'il était un excellent prêtre. Excellent homme, probablement puisqu'il avait gagné l'estime de ses ouailles, excellent prêtre, j'en suis beaucoup moins certain, ne serait-ce qu'au vu de la réaction des paroissiens, car, enfin, s'il avait été aussi bon pasteur qu'on le laisse entendre, jamais les fidèles n'auraient réagi de la sorte.
Etre catholique, c'est être fidèle à Dieu et la messe est l'acte le plus solennel du culte rendu rendu à Dieu. Que signifie donc cette grève de messe décidée par les fidèles. elle est avant tout une offense personnelle vis-à-vis du Créateur mais elle prive par la même occasion les "grévistes" des grâces de la sainte communion. Le curé, à la différence d'un saint curé d'Ars, n'a visiblement pas réussi à élever les âmes pendant tout son ministère sacerdotal.
On le constate en observant la perte du sens surnaturel comme du sensus ecclesiae chez tous ces paroissiens. On fait désormais grève de messe en France comme on fait grève pour le maintien du pouvoir d'achat, contre le CPE, contre la modification des horaires de travail des cheminots de la SNCF, là, où, précisément, la prière des paroissiens aurait dû prévaloir plus que jamais. Tout ceci montre les ravages du siècle dans les consciences, dans nos consciences. La grève, sport éminement français, a été la réponse imbécile à un drame humain et spirituel, car il est toujours douloureux de voir un prêtre défaillir gravement. C'est toute l'Eglise qui en souffre.
Rappelons-nous donc la devise de Jeanne d'Arc : "Messire Dieu premier servi", ce qui nous préservera de bien des dérapages.
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