lundi 19 novembre 2007

Chronique de la vie quotidienne

L'autre jour je m'aperçois que mon téléphone portable est bloqué. Tant pis c'est de ma faute. J'ai complètement oublié de payer la facture qui était restée sagement dans son tiroir de rangement parmi d'autres factures en instance. Ce courrier est en général très abondant surtout en fin d'année où il s'agrémente de courriers de teinte verte - cela fait tellement plus écolo - à entête du Trésor Public.


Bref, ma facture de téléphone qui, elle, est plutôt orange est restée en souffrance et l'opérateur se rappelle à mon bon souvenir de façon radicale. Il est vrai que j'utilise assez peu le téléphone cellulaire. Je le prends quand je sors. C'est une sécurité au cas où. Il est pratique en vacances mais il se trouve que je ne suis pas en vacances 365 jours par an même si je suis désormais retraité. C'est pourquoi j'ai un modèle rudimentaire qui me semble déjà assez compliqué comme cela. On ne m'enlèvera pas l'idée que pour téléphoner il vaut mieux utiliser un téléphone et pour prendre des photographies se servir d'un appareil photo. Cela tombe sous le sens. Alors utiliser un téléphone pour prendre des photos, ou prendre son appareil photo pour téléphoner (c'est une question de point de vue, ce qui soit dit en passant va renforcer le relativisme ambiant) pensez donc! On nous fait maintenant des portables qui en plus de la photo font caméra, récepteur de télévision et que sais-je encore. A quand les appareils qui feront en plus machine à laver et fer à repasser? Moyennant quoi nos portables sont livrés avec une notice d'emploi qui va bientôt s'apparenter à un manuel de bord pour équipage de Boeing 747!


Revenons-en à ma facture, je m'écarte de mon propos mais il y aurait tellement à dire sur ces portables qui sont le reflet d'une société bien malade. Nous sommes samedi matin. Qu'à cela ne tienne je vais appeler l'opérateur pour régler directement par carte bancaire. Comme çà le téléphone sera débloqué. On peut appeler ledit opérateur à partir du portable c'est gratuit. Je ne peux pas puisque le mien est frappé d'interdiction! Je me rabats sur la ligne fixe. C'est payant. Tant pis mon vieux, la prochaine fois tu feras attention à ta facture!


Je compose un numéro pour me retrouver aussitôt dans un parcours labyrinthique. Une voix suave vous débite des banalités dont vous n'avez que faire mais ça fait durer la communication et pendant ce temps le destinataire engrange des sous. Il n'y a pas de petits profits. Puis la même voix me demande afin de me faire identifier de composer sur le clavier de mon téléphone les 10 chiffres de mon numéro de portable. Et c'est parti...zéro...six...zéro...huit...cinq... trois... zut! Il n'a pas affiché le cinq! J'efface et je recommence. Enfin on y arrive. Mais comme j'ai dépassé le temps imparti la voix anonyme me dit :"nous n'avons pas reconnu votre numéro, veuillez recomposer à nouveau...etc". Très discipliné je m'exécute. Enfin j'entends la voix à nouveau: "si vous appelez pour un abonnement tapez 1, si etc...tapez 2, si... si et si. Comme aucune proposition ne correspond à l'objet de mon appel je demande à parler à un conseiller. Je tape la touche correspondante. Toujours cette même voix féminine m'annonce que toutes les lignes sont occupées et que le délai d'attente est estimé à 5 minutes. Au point où j'en suis je vais attendre un peu. En plus pour le même prix j'ai droit à une musique, c'est épatant, non? Même si cette musique finit par vous taper sur les nerfs au bout de deux minutes. Le temps passe encore et de nouveau la voix féminine " Toutes nos lignes sont occupées, que faire? Vous pouvez rappeler un peu plus tard, vous pouvez nous appeler sur notre site www etc... Vous pouvez...vous pouvez et puis la voix s'arrête et tout est coupé. Bip bip bip. Vous avez passé 10 minutes pour rien et vous avez payé une communication à 0,15 euro la minute ou plus je ne sais plus.


Allons sur internet sur le site de l'opérateur. Au moins c'est gratuit! Je me connecte. Je clique sur "clients" puis "accéder à mon compte". Ah on me demande mon numéro de téléphone et mon mot de passe. Je compose mon numéro. Le mot de passe je ne sais plus, je n'ai pas consulté ce site depuis une éternité. En général j'utilise le même mot de passe sur tous les sites. Je ne sais pas si c'est bien prudent mais je n'ai pas envie de traîner un répertoire en trois volumes contenant tous les mots de passe et codes que l'on me demande quotidiennement et souvent pour accéder à des sites généralistes sans aucun caractère confidentiel.
Manque de chance, ce n'est pas mon mot de passe habituel. Comme je ne m'en souviens absolument pas je clique sur "vous avez oublié votre mot de passe". On me demande une nouvelle information du type l'âge de votre voisine de palier. J'entre l'information et je valide. C'est parti. En retour un message s'affiche. Votre mot de passe vous a été adressé directement sur votre téléphone portable!!!??? Cherchez l'erreur. Je veux payer pour débloquer ma ligne et on m'envoie le mot de passe sur cette même ligne bloquée.


Du coup, j'abandonne, pour aujourd'hui j'ai ma dose ! Finalement j'ai découpé le TIP joint à la facture, je l'ai rempli et je l'ai posté. Ca mettra un peu plus de temps. Après tout je ne suis pas pressé. Je me suis passé de portable pendant 45 ans. Je peux bien m'en passer 15 jours. Et si je m'en passais définitivement. Je vais y réfléchir. Je n'aurais plus à payer dans ma facture de téléphone les cachets publicitaires pharaoniques d'un joueur de football retraité qui est parti naguère, un soir d'été, sur un coup de tête.


Même jour samedi après midi. Nous filons au centre commercial de la Valentine sur l'autoroute en direction d'Aubagne. La Valentine. Il y a toujours le vieux village, celui que le petit Marcel Pagnol traversait après être descendu du tram qui l'avait amené de Marseille, quand il montait avec ses parents et son frère Paul aux Bellons leur maisonnette de vacances sur les flancs du Garlaban. Aujourd'hui il y a une autoroute, un centre commercial, des immeubles et les flancs du Garlaban se sont singulièrement couverts de constructions pas toujours très heureuses. Ah pauvre Marcel Pagnol, s'il revoyait aujourd'hui les lieux de son enfance!


Nous allons au centre commercial car j'ai décidé de remplacer mon ordinateur qui commence à dater par un nouveau P.C plus adapté à mes besoins. pensez l'ancien doit voir trois ans et demi. C'est une vraie pièce de musée. Je vais dans un magasin que sa publicité vante pour son célèbre contrat de confiance. S'ils le disent c'est que c'est vrai! Faisons donc confiance!


Discussions, comparaisons je me décide j'opte pour un appareil ACER. Il paraît que c'et le top du top, à en croire le vendeur. Je jugerai sur pièces. En attendant les caractéristiques techniques me conviennent. Je prends. Cinq minutes après le vendeur revient. Désolé nous n'en avons plus en réserve. Le dernier est parti il y a un quart d'heure mais je vous propose de le prendre dans un autre magasin. Nous nous installons de part et d'autre d'un bureau coincé entre deux rayons de marchandises. A Marseille Cantini, ils sont aussi en rupture de stock par contre il reste encore des modèles disponibles à Aubagne. Tant pis, j'irai à Aubagne. Cà me prendra une demi-heure de plus. Nous filons sur Aubagne. Un samedi après-midi à l'approche des fêtes de fin d'année, il y a du monde et ça roule mal. Tant bien que mal, je trouve le magasin et je prends en compte, après trois signatures, le colis qui m'attendait.


Retour à la maison. Je démonte l'ancien matériel. Je branche le nouveau P.C. J'appuie sur le bouton de mise en marche. Rien! Nada!Ecran noir total sur le moniteur! Je vérifie mes branchements, je teste avec un autre moniteur. Toujours rien. Je vais appeler tout de suite le vendeur. Je ne trouve nulle part le numéro de téléphone du magasin, ni sur la facture, ni sur le bon de garantie. J'appelle la ligne service après vente. Ah cette fois c'est une voix masculine et ça marche par reconnaissance vocale :"si vous appelez pour un téléviseur dites téléviseur". On sent d'entrée de jeu une relation très personnalisée entre le fournisseur et le client. Je tombe sur une opératrice et je lui débite mon histoire. Elle prend note et me dit qu'elle va me mettre en liaison avec un technicien. Musique. Je poireaute quelques minutes. L'opératrice revient et m'annonce que tous les techniciens sont occupés et me propose de rappeler dans une demi-heure. Une demi-heure plus tard je rappelle. Ce n'est plus la même opératrice. Cette fois-ci j'ai affaire à une voix masculine. Je raconte à nouveau mon histoire et l'opérateur de me répondre qu'ils sont saturés en raison de la grève et me demande de rappeler lundi matin. La grève? Qu'est ce que ça vient faire? Vous êtes fournisseur, vous êtes liés par des obligations vis à vis de votre clientèle. Et votre fameux contrat de confiance qu'est ce que vous en faites? Grève ou pas grève je n'ai pas à entrer dans ces considérations. Et l'opérateur de me répondre que je suis en liaison avec un centre situé en région parisienne qui tourne en sous effectif ce jour là, bon nombre de leurs techniciens n'ayant pu se rendre sur leur lieu de travail à cause de la grève qui sévit dans les transports publics.


Aujourd'hui lundi. Un technicien m'a appelé à 8 heures. Il me fait procéder à quelques manipulations techniques. Sa voix est absente. Il constate ce que je savais depuis samedi, à savoir qu'il y a un vice dans l'appareil et me dit qu'un technicien passera mercredi. Mon sang ne fait qu'un tour. Désolé, monsieur, j'ai acheté un produit neuf, il ne fonctionne pas. Je ne vais pas attendre trois jours. Il y a un vice manifeste. Je tiens à rapporter l'appareil au magasin et qu'on procède à un échange standard. Le technicien me dit alors de sa voix monocorde: "Dans ce cas j'annule l'intervention et vous rapportez l'appareil au magasin". je l'entends pianoter sur son clavier. J'arrête là la communication.


Cet après-midi j'irai donc rapporter l'ordinateur à Aubagne, mais je sens que le parcours du combattant n'est pas fini et que l'échange standard n'est pas inscrit dans la culture de cette maison malgré son contrat de confiance. J'opterai pour ma part plutôt pour un contrat de défiance.


En attendant quelle belle société s'annonce avec le règne de la communication numérisée! Je plains les jeunes générations car nous ne sommes qu'au début de ce phénomène.

Vous avez appelé la police ne quittez pas. Il m'est arrivé de l'appeler et j'ai eu ce message pendant de longues minutes alors qu'il avait urgence. Et il paraît que c'est le progrès! Bravo!

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