lundi 10 décembre 2007

Anne-Lorraine

Anne-Lorraine SCHMITT
Requiescat in pace
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Qu’il me soit permis tout d’abord de m’unir par la prière à la famille d’Anne-Lorraine. Que nos humbles et petites prières soient autant de perles lumineuses afin de réconforter une famille dans l’affliction.

Anne-Lorraine avait 23 ans. Elle était fille de colonel, ancienne élève de l’école de la Légion d’honneur. Catholique pratiquante, elle se rendait en ce dimanche matin à la messe. Que sa route ait croisé celle de Deve-Oglou, son assassin, condamné en 1996 pour viol commis dans une rame de cette même ligne du RER, que cet individu ait été libéré sans que la justice, apparemment, ne s’inquiète d’une possible et même certaine récidive, cela n’a aucunement ému les politiques si prompts à condamner les agressions sauf lorsqu’elles sont commises sur des Français de souche. Alors une catho, fille d’officier de l’Armée de Terre, fut-elle sauvagement frappée de 34 coups de couteau, pensez donc, c’est sans intérêt pour nos médias.

Or, il se trouve que ce même jour deux jeunes adolescents issus de l'immigration trouvent la mort tragiquement dans une collision avec une voiture de police à Villiers-le-Bel. Indépendamment des émeutes violentes que cet accident suscita dans le quartier, la presse se répandit en articles larmoyants sur ces adolescents. Ivan Rioufol dans son billet du Figaro, daté du vendredi 30 novembre, souligne à juste titre que ces deux jeunes gens circulaient sur une moto non homologuée, donc non destinée à la circulation, à vitesse excessive et sans casque. Nous connaissons suffisamment le comportement de ces jeunes circulant à moto dans nos villes pour savoir qu'ils prennent souvent des risques considérables. La mort de deux jeunes adolescents est toujours tragique. Toutefois elle ne peut être en aucun cas mise sur le même plan que l'assassinat sordide d'Anne-Lorraine. Dans le premier cas, nous avons affaire à des jeunes dont le comportement est un comportement délictuel à risque et qu'on a laissés faire avec le plus grand laxisme jusqu'à ce que l'irréparable se produise. Et pourtant on nous parle sans cesse de ces associations ou de ces « grands frères » qui font, paraît-il, un travail remarquable dans les quartiers. En l'occurrence, si vraiment un travail de fond avait été entrepris, nous n'aurions probablement pas aujourd'hui à déplorer cette double mort accidentelle. Quand on ajoute à ces carences, l’attitude de la police, au demeurant compréhensible dans le climat délétère de la France actuelle, qui, la plupart du temps, ferme les yeux sur ce genre de délinquance routière peu sanctionnée. la moindre tentative d'interpellation risque à tout instant de se transformer en catastrophe imputable, cela va de soi, aux policiers qui prennent en chasse de pauvres petits jeunes irréprochables. Qu’on se rappelle les faits à l’origine de l’explosion des banlieues en novembre 2005.

Anne-Lorraine, quant à elle, ne demandait rien. Elle se rendait tranquillement à la messe dominicale en empruntant le RER. Seul point commun avec l'affaire de Villiers-le-Bel, elle a été victime du laxisme généralisé qui oublie de sanctionner les comportements délinquants ou remet en liberté des individus à haut risque de récidive. Il y a quelques mois de cela, un psychiatre de renommée déclarait sur Europe 1 qu'on ne pouvait jamais affirmer formellement qu'un malade sexuel était définitivement guéri.

Récemment, dans son émission « Faites entrer l'accusé », Christophe Hondelatte posait la question au procureur de la république de Troyes de savoir pourquoi les frères Jourdain dont le passé judiciaire était lourd avaient été libérés sans la moindre précaution. Or il se trouve que cette affaire des frères Jourdain me tient particulièrement à coeur. Pour ceux qui ne se souviendraient pas des faits, je rappelle que les deux frères prirent à bord de leur camionnette un soir de février 1997 quatre jeunes filles qui rentraient d'un bal de carnaval près de Boulogne-sur-Mer. Elles furent sauvagement violentées et assassinés. Les corps furent retrouvés dans un blockhaus sur le littoral, quelque part entre Boulogne-sur-Mer et le Touquet.


Ayant moi-même servi dans ma carrière de gendarmerie dans le Nord-Pas-de-Calais, je fus amené à diriger une enquête judiciaire dans le cadre d'un viol commis par Jean-Louis Jourdain. J'avais, à l'issue de l'enquête de crime flagrant procédé à une double qualification, la tentative d'assassinat ainsi que la tentative de viol. Les magistrats ignorèrent la tentative d'assassinat pour des questions d'opportunité complexes. Quand l’affaire arriva devant la cour d’assises de Saint-Omer, je fus cité en tant que directeur d’enquête par le ministère publique. Je fis ma déposition et la présidente de la cour attentive à mes déclarations et qui avait sous ses yeux mon procès-verbal de synthèse, nota bien que j'avais qualifié la tentative d'assassinat à partir d'éléments précis recueillis par les enquêteurs.

Jean-Louis Jourdain fut condamné à 10 ans de réclusion criminelle, le maximum pour le crime qu’il avait commis, à savoir un viol. L'avocat général qui était alors substitut du procureur de la république auprès du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer était aux anges. Son réquisitoire avait porté. Jourdain avait écopé du maximum. Pour ma part, je ne partageais pas, de loin s'en faut, son enthousiasme. Jourdain avait déjà accompli deux années de détention préventive, ce qui signifiait qu'avec le jeu des remises de peine systématiques, il serait assez rapidement remis en liberté. Personnage extrêmement fruste, Jean-Louis Jourdain ne pouvait que récidiver. J'en avais la certitude. J’eus l'occasion de l'exprimer publiquement mais que pouvais-je bien faire d'autre ? Je me souviens, du soir du jugement, où rentrant à la maison, je dis, désabusé, à mon épouse que le plus terrible pour moi était de savoir que tôt ou tard il y aurait une nouvelle victime. Il m’était insupportable de penser que quelque part vivait une jeune femme dont la mort était en quelque sorte déjà programmée par la faute d’une société devenue incapable de protéger ses membres. Hélas, j'étais loin de la vérité ; ce ne fut pas une mais quatre victimes qu'il fallut déplorer.

C'est donc à l’occasion de l'évocation de ce quadruple meurtre que Christophe Hondelatte questionna l'ancien substitut devenu depuis procureur de la république à Troyes. Avec bon sens le journaliste lui demanda comment se faisait-il que la justice ait pu relâcher deux individus aussi dangereux. La réponse du procureur fut sidérante. Il déclara qu'à l'époque, comme si les faits remontaient au temps de Mathusalem, on ne pensait pas que des individus ayant purgé une longue peine de détention pouvaient récidiver. Réponse de circonstance,probablement, manière de dégager en touche afin de ne pas devoir s'expliquer sur les responsabilités de la justice et son fonctionnement calamiteux, plus sûrement. Mais je crois, cependant, que la justification donnée par ce magistrat correspond bien à son sentiment profond, révélateur du décalage entre une justice qui se fonde sur une idéologie bien teintée de rousseauisme béat et la réalité d’une criminalité sans cesse croissante, même si pour des raisons politiques et, là encore idéologiques, on jette un voile pudique sur les chiffres quand on ne triture pas les données statistiques pour leur faire dire le contraire de ce qu’elles signifient.

Très récemment encore, dans un corrigé officiel de devoir dont le sujet était précisément consacré à la violence des banlieues, je ne fus guère surpris de constater que dans le document remis aux élèves (candidats adultes à des concours administratifs internes) pas une seule fois le terme immigration n’y figurait. Sur les 10 pages du document, on évoque une multitude de causes, le chômage, le repli sur soi, la politique architecturale, la politique des transports, les effets nocifs de la télévision, les difficultés familiales et bien d’autres facteurs encore. Le rédacteur de ce beau document n’a pas eu le courage intellectuel d’évoquer ouvertement la question de l’immigration telle qu’elle est pratiquée en France. Les causes que je viens de citer ne sont pour la plupart d’entre elles que les causes secondes de l’immigration, d’une part et surtout de la crise morale profonde d’un peuple qui ne croit plus en lui-même.

Et si d’aventure, d’aucuns manifestent le moindre soupçon de fierté française, très vite nos « élites » les rappellent à l’ordre en les taxant de racistes et de xénophobes, ce qui les disqualifie ipso facto, excommunication des temps modernes.

L’esprit de 1940 que je fustigeais ici même dans un article antérieur est plus florissant que jamais, semant au passage son lot de victimes, de larmes et de souffrances.

Nous ne pouvons que prier pour que d'autres Peggy, Audrey, Isabelle, Amélie, Anne-Lorraine, Jeanne-Marie et bien d'autres victimes encore ne viennent alourdir ce martyrologe qui ne doit rien au hasard mais résulte de la faute de chacune ou chacun d'entre nous, à commencer par celui du choix de politique que nous formulons ou nous ne voulons pas formuler au moment de glisser le bulletin dans l' urne.

Sub tuum praesidium confugimus, Sancta Dei Genitrix. Nostras deprecationes ne despicias in necessitatibus sed a periculis cunctis libera nos semper, Virgo gloriosa et benedicta.

Sous votre protection nous nous réfugions, Sainte Mère de Dieu, Ne rejetez pas nos prières, nous qui sommes dans le besoin, mais libérez-nous toujours de tous les périls, Vierge glorieuse et bénie.

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