samedi 27 octobre 2007

Moyen-Age, Eglise et obscurantisme


Le temps disponible que me procure mon statut de retraité me permet depuis trois ans de dispenser différents cours de préparation aux épreuves de culture générale des examens prévus dans le cadre du déroulement de carrière ou en vue du concours d'admission à l école des officiers de gendarmerie. Ces cours s'adressent donc à des auditoires de niveaux différents. Toutefois, les élèves ont en commun leur jeune âge, relativement au mien! Les plus jeunes ont environ 27 ans et les plus âgés la quarantaine. Le niveau général est assez moyen dans son ensemble mais ce qui frappe de prime abord c'est avant tout le grand conformisme de pensée. La propagande officielle et l'œuvre d'abrutissement de l'éducation nationale, visiblement, ont porté leurs fruits.

Récemment, nous travaillions sur un sujet donné cette année même à un examen en interne. Il s'agissait de donner son point de vue sur les moyens modernes de communication en précisant s'ils permettaient ou on d'accéder facilement à la connaissance. Sujet intéressant, peu difficile dans la mesure où il ne faisait pas appel à des connaissances techniques mais devait permettre aux candidats d'exercer leur sens critique.

Or, certains m'ont, à cette occasion, ressorti les vieilles rengaines sur l'accès à la connaissance facilité depuis le siècle des Lumières, lesquelles lumières ont permis, d'après ces mêmes candidats, de sortir de siècles d'obscurantisme entretenu par l'Eglise. Un candidat, garçon sympathique et faisant partie de ceux qui me paraissent avoir une culture d'ensemble plutôt riche m'écrit ceci dans sa copie:

"Au moyen-âge, seuls les érudits et plus particulièrement l'église, détenaient la connaissance. Le peuple était plongé et maintenu dans l'ignorance. Cette époque porte un nom l'obscurantisme. Puis il y eu le siècle des Lumières ou par opposition, la connaissance fût rendue accessible et surtout elle fût libérée de ceux qui la détenait comme un pouvoir."

J'ai volontairement gardé l'orthographe originelle. Elle est à l'image de ce que je peux observer dans la plupart des copies. Je dirais même que par rapport à la moyenne, l'auteur de ces lignes commet relativement peu de fautes. C'est dire!

Un autre candidat pendant le cours me fit observer qu'il y eut l'Inquisition et aussi le massacre des Cathares. Bref l'Eglise est chargée de tous les péchés de la terre.

Dans le climat de christianophobie générale qui règne depuis plusieurs décennies et qui s'est considérablement amplifié à partir des années 80, il ne faut guère nous étonner du résultat obtenu par un matraquage des cerveaux digne des régimes totalitaristes.

Les deux candidats sont à l'image de l'immense majorité des Français. Ils ont pris pour argent comptant tous les dogmes républicains qu'on leur a enseignés. A aucun moment ils n'ont exercé une saine critique fondée sur une raison droite. Mais encore faudrait-il pour cela que l'enseignement officiel leur apprît précisément à exercer ce sens critique, mais c'eût été trop dangereux pour le système établi.

Je ne suis pas dans le secret des officines de tout poil pour savoir si nous sommes en face d'un vaste complot mais ce qui est effrayant c'est de constater la convergence de tous ceux qui ont la charge de transmettre le savoir ou l'information pour salir l'Eglise. Ces enseignants, ces journalistes, ces maisons d'édition, tous se sont arrogés un droit de censure absolu sur tout ce qui n'est pas conforme à leur idéologie. Et ce sont ces mêmes démocrates qui nous enseignent l'obscurantisme de l'Eglise catholique pratiquant les autodafés et mettant à l'Index les écrits contraires à la foi ou pire encore que l'Eglise maintenait volontairement les esprits dans l'ignorance crasse pour mieux asseoir son pouvoir sur les consciences.

Anesthésiés par la pensée officielle, les Français ne savent même plus raisonner à partir d'évidences qui sautent aux yeux. Oui, le Moyen-âge était une période d'obscurantisme, puisque vous le dites, mais alors expliquez-nous comment les cathédrales, ces purs joyaux de l'Occident chrétien ont pu sortir de terre et résister à l'épreuve du temps pour nous laisser ce plus beau témoignage d'une époque où la société toute entière vivait et respirait au rythme de l'année liturgique. Car enfin, vous dirai-je, si ces cathédrales ne se sont pas effondrées à peine finies, c'est bien parce que les architectes de l'époque avaient un savoir-faire prodigieux pour bâtir des édifices stables malgré leur hauteur vertigineuse pour l'époque. Notre Dame de Paris, Chartres, Reims, Strasbourg, Bourges, Beauvais, Cologne demeurent des témoins vivants de l'architecture médiévale.


Si nous remontons dans le temps, il nous faut aussi prendre en compte tout l'art roman. N'oublions pas que ce que nous qualifions de Moyen Âge correspond à une période qui s'étend sensiblement de l'époque carolingienne, autour des années 800, jusqu' à la découverte des Amériques en 1492, soit sept siècles. C'est un peu comme si les historiens du quatrième millénaire à venir, si l'humanité parvient jusque là à survivre à sa course folle, mettaient dans le même sac la France depuis Philippe le Bel jusqu'à…Nicolas Sarkozy. Je sais bien que pour ce dernier la France de Jeanne d'Arc est aussi celle de Louis XIV et de Jean Jaurès mais tout de même!




La cathédrale de Beauvais splendeur de l'art ogival et produit de ...l'obscurantisme!

Il faut donc regarder l'art roman remarquable par sa sobriété et sa pureté. Chaque fois que je vais à l'abbaye de Sénanque, je m'émerveille de deux choses: l'acoustique et la lumière. Les sons prennent un relief particulier et je me souviens de la démonstration que nous avait un moine cistercien sur la résonance particulière, par amplification du son, que pouvait prendre la cantilène grégorienne. Ce qui est surprenant aussi c'est la luminosité des lieux. Certes, nous sommes en Provence mais cela n'explique pas tout. En effet, on remarque que les ouvertures sont peu nombreuses. Cependant elles sont conçues pour laisser entrer le maximum de lumière, ce qui fait qu'il n'y règne aucune pénombre.


La beauté dépouillée de l'abbaye de Sénanque au fond de son vallon verdoyant.


Comment passer sous silence le rayonnement spirituel et intellectuel du monachisme bénédictin en occident. Rien ou presque ne nous serait parvenu de la culture hellénique et romaine sans l'oeuvre des moines. Alors que l'invasion des barbares, la chute de l'empire romain marquent le début d'une période de décadence, l'Eglise sera la cheville ouvrière de la restauration de la civilisation en occident. Ah Messeigneurs évêques de France, puissiez vous vous inspirer de l'oeuvre de vos vénérables prédécesseurs plutôt que de vous réfugier dans un silence frileux et tacitement approbateur ou pire de battre votre coulpe sur la poitrine de ceux qui ont l'heur de vous déplaire, sans compter ceux qui font l'apologie à peine voilée du communisme!

Dans la littérature, Le Moyen Age n'est pas en reste. Probablement que beaucoup d'œuvres ont disparu dans les incendies, nombreux à cette époque et particulièrement destructeurs. La chronique de la Grande Chartreuse nous apprend que lors de l'incendie qui détruisit le monastère en 1371, Dom Guillaume de Raynald, le Prieur, s'écria "Mes Pères, mes Pères, ad libros, ad libros, sauvez les livres, sauvez les livres!" La révolution de 1789 se chargea aussi d'achever l'oeuvre accidentelle du feu en détruisant une grande partie de notre patrimoine religieux. Combien d'ouvrages, d'édifices disparurent dans la tourmente? Nous ne le saurons jamais. Tout au plus pouvons-nous avoir une idée de l'ampleur du saccage en dressant la liste des abbayes et des églises vandalisées quand elles ne furent pas tout simplement détruites.
Cependant, nous sont parvenues bon nombre d'oeuvres médiévales tous genres confondus.

Les chansons de gestes, les fabliaux, les farces, le roman courtois, les lais de Marie de France, les Chroniqueurs Villehardouin, Joinville, Froissart et Commynes le théâtre de Rutebeuf, Guillaume de Machault, Chrétien de Troyes, les auteurs et les genres littéraires ne manquent pas pour une époque que l'on considère généralement comme arriérée. Et surtout n'oublions pas les grands noms, je dirai le grand nom, saint Thomas d'Aquin dont la philosophie et l'analyse politique demeurent étonnamment d'actualité, même si au sein même de l'Eglise le courant moderniste, notamment dans les années 60, fit tout pour le discréditer au profit de théologies nouvelles pourtant condamnées par les papes jusqu'à Pie XII.

Le Sire de Joinville (1224 - 1317). Chroniqueur, il est l'auteur de l'histoire de saint Louis

Etrangement, il ne viendrait à personne l'idée de considérer que la civilisation romaine fut une civilisation obscurantiste. Pourtant, la société romaine ne brillait par le raffinement de ses mœurs. Les jeux du cirque étaient barbares, le paterfamilias avait droit de vie ou de mort sur ses enfants, l'esclavage généralisé avilissait la personne humaine. Les mœurs étaient rudes. Complots, assassinats jalonnent l'histoire de l'Urbs.

Je n'ai pas davantage entendu les grandes âmes condamner cette page si "glorieuse" de notre histoire que fut la révolution de 1789. Et pourtant elle en fit des victimes, d'autant moins pardonnable dans sa propre logique, que cette révolution s'inspirait des Lumières pour promouvoir la liberté et avec elle une ère nouvelle!

La révolution ne fut pas obscurantiste. A Lavoisier qui demandait au tribunal révolutionnaire un délai pour pouvoir terminer ses travaux de recherches, le président du tribunal répondit que la révolution n'avait que faire des scientifiques.

Nous réserverons pour plus tard une étude sur l'Inquisition car les études à son sujet sont très controversées. Il est toujours difficile de faire la part des choses dans la plus grande objectivité.

Si l'humanité se réveille un jour, ce qu'à Dieu ne plaise, je ne doute pas un instant que l'on puisse qualifier notre civilisation d'obscurantiste. La dégradation des mœurs, l'avortement légalisé en sont les marques les plus visibles. Le dogme unique qui sévit empêche tout débat sérieux. Le créationnisme fait sourire mais sait-on que la théorie de l'évolutionnisme ne s'appuie sur aucune preuve formelle et que loin d'apporter une réponse à l'origine de la vie, elle pose plus de problèmes qu'elle n'apporte de solutions.

Réchauffement de la planète en raison de l'activité de l'homme? Où peut-on lire ou entendre dans la communication institutionnelle que rien ne prouve que si réchauffement il y a, il soit la conséquence de notre activité polluante?

Claude Allègre qui n'est pourtant pas de ma chapelle, fait dans son livre intitulé "Ma planète" dont on a peu parle, et pour cause, une mise au point très édifiante sur l'écologiquement correct tel qu'on le pratique actuellement.

Aujourd'hui plus que jamais nous sommes tombés dans l'hystérie de la lutte contre le réchauffement. Une chose est certaine, ce combat n'est pas perdu pour tout le monde car il sera une source de profits considérables pour le monde des affaires et pour tous les profiteurs et opportunistes. Le citoyen lambda risque par contre d'y laisser beaucoup de plumes.

Mais tant que l'on "éduque" les Français sur leur propre histoire revue et corrigée, on est au moins certain qu'ils n'auront pas le mauvais goût de poser les bonnes questions sur les vrais problèmes de notre pauvre société.


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